Interview : Charlotte Corday
[Travail réalisé dans le cadre de l’option renforcement Histoire 5ème encadrée par M. Campolini.]
La voix des femmes – Journal Socialiste & politique
Ami(e) lecteur(trice), aujourd’hui j’ai la chance de rencontrer Charlotte Corday.
Bonjour Mme Corday, pour les lecteurs qui ne vous connaissent pas, pourriez-vous nous parlez de vous en quelques mots ?
Bien sûr, je m’appelle Marie-Anne Charlotte de Corday, je suis la fille de François de Corday et j’ai 24 ans. Je suis née en Normandie et je vivais dans une maison près de Caen. Grace à ma famille j’ai la chance d’avoir eu une éducation de qualité. Je suis passionnée par la littérature, que ce soit de la romance ou des nouvelles en passant par la politique. Ce sont les idées girondines qui m’ont conquises et qui m’ont poussé à venir à Paris et qui m’ont conduites aujourd’hui en prison (Laroche-Signorile, 2018).
Et pour quelle raison vous retrouvez-vous en prison ?
J’ai tué un monstre connu sous le nom de Marat. Après avoir entendu les agissements de ce dernier, j’ai quitté ma campagne pour venir à Paris et l’arrêter par tous les moyens.
J’ai logé dans une charmante chambre à l’hôtel de la Providence, pas très loin de l’allée marchande. C’est d’ailleurs précisément à cet endroit que j’ai trouvé l’arme du crime.
Le matin du 13 juillet 1793, je suis allée acheter un couteau de cuisine et je me suis directement dirigée vers la demeure de Marat. J’ai dû bien m’y prendre à deux reprises avant de pouvoir le rencontrer. Sa compagne, Simone Evrard, s’est opposée avec véhémence à notre entrevue, mais Marat n’a pas pu résister à ma proposition : je lui livrerais des informations sur des traîtres réfugiés à Caen.
Sa compagne m’a introduit auprès de Marat et, après un bref échange au cours duquel je me suis assurée qu’il n’y avait pas de témoins dans la pièce, j’ai poignardé en pleine poitrine. Comprenez-moi : « j’ai tué un homme pour en sauver cent millions ! »
N’avez-vous pas eu de doutes sur vos actions avant de passer à l’acte ?
Oui bien sûr, et je pense que c’est naturel. D’ailleurs, je crois qu’aucun Homme ne pourrait affirmer n’avoir jamais douté. J’ai mûrement réfléchi à mes actes. Néanmoins, en arrivant devant Marat, allongé dans sa baignoire, j’ai hésité. Je lui ai livré les informations que j’avais à propos des Girondins* réfugiés et lui ai demandé quel sort il leur réservait et, lorsqu’il m’a dit vouloir les guillotiner, alors que leur seul crime est de ne pas partager la même vision politique que lui, mes doutes se sont envolés et je suis passée à l’acte.
Je conçois toute l’horreur que suscite un meurtre mais je ne pourrais jamais vous dire que je le regrette.
« J’ai vengé bien d’innocentes victimes, j’ai prévenu bien d’autres désastres ».
Quelle est votre vison de la France actuelle ?
Je suis loin de soutenir que l’idée selon laquelle « tous ces hommes qui devaient nous donner la liberté l’ont assassinée ». J’ai vu la France passer d’un royaume au bord de la famine à une République abusive et corrompue par des hommes découvrant le pouvoir. Ces hommes, qui se font appelés citoyens, ne prônent que la violence et la haine contre toute personne qui s’éloigne de leurs vision de la France. Ce ne sont pas des citoyens, ce ne sont pas des hommes, ce sont des monstres et j’ai tué le pire d’entre eux.
Avez-vous une rancune particulière contre Marat ?
Avant de connaître ses agissements, il m’était totalement inconnu. C’est à travers la lecture de son journal « L’ami du peuple » que j’ai pris connaissance de ses discours et travaux dans lesquels il appelait à la violence et au meurtre. Sa maladie cutanée, le rongeait de manière incessante et le rendait fou. Une sensation de brûlures sur sa peau en lambeau lui faisait passer des journées entières dans un bain de mercure afin de le soulager et à lister des noms de personnes à supprimer. Cependant je ne me considère pas comme dieu, je ne peux pas décider qui mérite de mourir et qui peux vivre. Je n’ai donc posé aucune résistance lors de mon arrestation et j’ai avoué mon crime lors de mon interrogatoire sur place.
Pensez-vous que vous avez été jugé avec équité ?
Equité ?! (Rires). Non non, tout a été manipulé avec brio : la soudaine et mystérieuse absence de mon avocat, les questions tendancielles du jury qui ne cherchaient qu’à prouver ma culpabilité, ou encore la présence de témoins qui me portaient la plus grande haine. D’ailleurs, si par mégarde l’un d’entre eux osaient parler en ma faveur on le faisait taire.
Cette situation m’a permis d’utiliser ce procès comme tribune politique et d’affirmer que j’avais agi seule, sans complice, en ayant foi en mes convictions et pour le bien de tous. Bien entendu tout cela n’a pas empêché le président du jury de déclarer qu’il était « impossible et impensable que ce crime soit le fait de cette femme ». La préméditation et l’acte ne pouvait, selon lui, pas être la seule volonté d’une femme, l’esprit d’un homme devait y avoir contribué.
Est-ce que vous vous considérez comme féministe ? et si oui, pourriez-vous nous donner vos valeurs principales ?
(Sourire) Bien-sûr je le suis, et je pense que chaque femme a son échelle est féministe. J’ai eu beaucoup de chance de pouvoir étudier dans un institut privilégié où j’ai pu développer des idéologies propres sans une influence masculine pour dicter ma conduite.
Personnellement, je pense que le féminisme représente l’égalité intergenre, la solidarité et le respect de tous. En tant que telle, il est de notre devoir des se lever contre toute injustice. Je considère que la femme a la même capacité de raisonnement et d’intelligence que le genre masculin, il faut juste lui donner l’opportunité de les développer à leurs justes valeurs.
Pour finir, quel impact penser vous vous allez avoir sur les générations futures ?
Je ne me fais pas d’illusion sur ma positions actuelle. Ayant une condition de « femme », mes actes, et ma voix ne seront pas considérés par la société patriarcale actuelle. Pourtant je ne perds pas la foi dans les générations futures qui, je l’espère, me rendront justice au cours de l’histoire de la Révolution française.
Je vous remercie pour cet entretien et votre témoignage poignant.
Charlotte Corday mourra quelque heures après cette entrevue en public et par la guillotine sur la place de la révolution
Anika
*Les idéologies Girondin :
Les Girondins, sont également appelé les Brissotins. Cette étiquette est appliqué à ce groupe de politiciens républicains , dont certains sont originaires du département de la Gironde. Ils jouent un rôle de premier plan à l’Assemblée législative pendant la Révolution française. Provenant des classes sociales moyennes ou basses, avocats, intellectuels journalistes, les Girondins attirent également un public d’hommes d’affaires, de marchands(es), d’industriels(les) et de financiers de la provinces et de la campagne. Le terme « Girondin » est une appellation récente. Il n’est toutefois pas avéré qu’il s’agisse réellement d’un groupement organisé. Leurs adversaires, les montagnards, guidés Marat, les appellent souvent Brissotins en l’honneur de leur porte-parole le plus en vue, Jacques-Pierre Brissot.`
Bibliographie
Barbiche, B. (2012). Les institutions de la monarchie française à l’époque moderne. Paris, France: Puf.
Laroche-Signorile, V. (2018, Juillet 12). 13 juillet 1793 : Charlotte Corady asssassine le citoyen Marat dans sa baignoire. Consulté le 09 19, 2021, sur lefigaro.fr: https://www.lefigaro.fr/histoire/2018/07/12/26001-20180712ARTFIG00194-13-juillet-1793-charlotte-corday-assassine-le-citoyen-marat-dans-sa-baignoire.php
Luebering, J. (n.d.). Girondin politival group, France. (11, Editor) Retrieved Novembre 2021, 2021, from britannica.com: https://www.britannica.com/topic/Girondin
Mazeau, G. (2008, Janvier 01). Charlotte Corday et l’attentat contre Marat : événements, individus et écriture. de l’histoire (1793-2007). Thèse de doctorat. Paris, France: Armand Colin.
Mazeau, G. (2010, Juillet 15). Écrire la vie de Charlotte Corady. Naissance d’un enjeu de mémoire dans le premier XIXe siècle. (L. S. 1848, Éd.) pp. 27-41.
Ressi, M. (2019, Septembre 19). L’histoire en citation. Consulté le Octobre 2021, sur histoire-en-citations.fr: https://www.histoire-en-citations.fr/citations/charlotte-corday-marat-pervertissait-la-france
Soulier, V. (2008). Presse féminine, la puissance frivole. L’Archipel.